Territoires de vie aux limites

Territoires de vie aux limites

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Selon l’ethnologue Anne-Marie Brisebarre (CNRS), « depuis des siècles, voire des millénaires, le pastoralisme, en particulier la transhumance ovine, est emblématique des régions méditerranéennes, au nord comme au sud ». Depuis juin 2011, les paysages culturels de l’agropastoralisme méditerranéen sont inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO.

Les communs pastoraux de montagne, placés au cœur de cette exposition, sont des pâturages gérés par des communautés d’éleveurs qui, à travers une gouvernance collective impliquant une négociation permanente, assurent une utilisation durable des estives et, en raison de la participation de ses membres, limitent des possibles conflits liés à la concurrence pour l’accès à la ressource et son partage. Pour l’économiste Gaël Giraud (https://gael-giraud.fr/), les communs en général « sont les ressources, symboliques ou matérielles, qu’une communauté choisit d’administrer en se dotant de règles qui sont elles-mêmes soumises à délibération. Ce qui définit le commun n’est donc pas la nature de la ressource, mais le geste politique d’un collectif qui soumet à un discernement communautaire continue ses propres manières de faire dans la protection et la promotion de ce à quoi il tient ».

Les communs pastoraux mis en image dans cette exposition se caractérisent par trois principes fondamentaux et interconnectés, qui ne sont pas sans rappeler certains des « design principles »élaborés par Elinor Ostrom, première femme lauréate en 2009 du prix Nobel en sciences économiques : (i) une communauté locale entretient des liens forts et profonds avec un territoire ; (ii) cette communauté est un acteur clé dans les processus de prise de décision en lien avec la gouvernance territoriale des ressources ; (iii) cette gouvernance contribue à une gestion responsable et durable des écosystèmes et du patrimoine matériel et immatériel de ces mêmes communautés.

La création de cette exposition, dont une première version a été mise en ligne en avril 2021 par le musée virtuel d’écologie humaine, a été coordonnée durant deux ans et demi par Pablo Dominguez (éco-anthropologue au CNRS, laboratoire GEODE), avec l’appui de plus d’une vingtaine de co-auteurs et collaborateurs. Le processus a impliqué le croisement de plusieurs projets scientifiques, politiques et artistiques sur les communs pastoraux dans quatre pays : Maroc, Espagne, Monténégro et Turquie. Elle représente une création basée sur des contributions collectives impliquant de grands sacrifices personnels, alimentée par un engagement et un enthousiasme inestimables en faveur de ces systèmes. Sur la base de cette première version en ligne, Pablo Dominguez et Bruno Romagny (économiste à l’IRD, LPED, co-directeur du LMI MediTer 2016-2021) ont facilité la réalisation de cette exposition en ligne renouvelée, maintenant en trois langues, avec le soutien de l’OSU Pytheas (Aix-Marseille Université). En même temps, elle a été mise à l’honneur en format physique (18 panneaux en taille A0) durant le Congrès mondial de la nature, organisé par l’UICN à Marseille (3-11 septembre 2021), en lien avec la session thématique du 6 sept. 2021 sur les APAC Euro-Méditerrannéens : Communs pour la conservation de la nature et la résilience des communautés locales, organisée par ces mêmes chercheurs avec le soutien de Sergio Couto, coordinateur régional du consortium APAC pour l’Europe, et de la Direction de la communication et du partage de l’information de l’IRD. Cette exposition sera par la suite diffusée dans différents espaces et pays de la Méditerranée.

Cette exposition s’inscrit dans une tradition interdisciplinaire et transculturelle qui s’incarne notamment dans la recherche menée en partenariat et tournée vers les acteurs de terrain. A l’image des co-auteurs et collaborateurs de cette exposition, une telle tradition est portée à l’IRD en particulier par le LPED et par le Laboratoire Mixte International (LMI) MediTer « Terroirs méditerranéens » (2011-2021), croisant les regards des sciences humaines et sociales et ceux des sciences de la terre et du vivant autour la Méditerranée.



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